Hypnose et Thérapie Brève: Pierre Janet, la médecine psychologique
Nous avons choisi pour la rubrique "Références" un extrait de l'ouvrage "la médecine psychologique" de Pierre Janet publié en 1923, où il donna cette année-là au Collège de France un cours sur "L'évolution de la mémoire et de la notion du temps". Pierre Janet sera le sujet d'une prochaine rubrique "Grands Praticiens" qui rappellera à quel point son triple travail de philosophe, psychologue et de médecin a influencé la psychothérapie.
L’évolution de la psychothérapie
Pendant longtemps la psychothérapie a été pratiquée d’une façon que l’on peut appeler inconsciente ou du moins irraisonnée. Elle jouait un grand rôle dans les traitements miraculeux dans les influences des religions ou des morales mais les effets que l’on constatait n’étaient pas rattachés à leur véritable cause.
Au siècle dernier la psychothérapie semble avoir pris conscience d’elle-même. La renaissance de l’hypnotisme avait provoqué un grand enthousiasme : « L’esprit n’est pas quantité négligeable, avait dit M. Berheim, il existe une psycho-biologie, il existe aussi une psycho-thérapeutique, c’est un grand que l’esprit humain et le médecin guérisseur doit utiliser ce levier ». Beaucoup de médecins, comme le Dr A.T. Myers en 1893, ajoutaient : « Nascitur ars nova medendi ;il faut agir, non par l’estomac ou par le sang, mais par la pensée. Il faut pénétrer plus profondément dans le malade en appelant à la rescousse toutes ses forces les plus secrètes ».
Sans doute l’hypnotisme et la suggestion après la lutte contre l’école de Charcot, avaient traversé une période de décadence ; mais la thérapeutique morale n'avait pas disparu, elle avait seulement changé un peu son nom, elle s'était présentée sous la forme de traitements par le raisonnement et la persuasion. La moralisation médicale de M. Dubois (de Berne), le mouvement Emmanuel et le « new thought movement » en Amérique, les traitements par l'isolement et le repos, les procédés groupés sous le nom de psycho-analyse ne sont que des développements des mêmes croyances sous des noms différents.
Encore au début de ce siècle on avait vu éclore dans tous les pays et dans toutes les langues, surtout dans les pays de langue anglaise une énorme littérature sur ce nouveau moyen de soulager l'humanité souffrante. Pour ne prendre qu'un exemple dans les Etats-Unis d'Amérique des chaires de psychothérapie avaient été fondées, comme celle de M. Morton Prince à Tuff's college médical school, à Boston, de nombreuses conférences étaient faites de tous côtés sur ces sujets, des revues et toutes sortes d'ouvrages étaient consacrés spécialement à ces études.
J'ai déjà fait remarquer l'importance d'une littérature à demi-scientifique, à demi-populaire publiée surtout en Amérique ; j'ai signalé les publications de la new thought C°, le grand ouvrage de vulgarisation publié par Parker « Psychothcrapy » en trois volumes in-4° qui parut à New-York en 1909 et auxquels collaborèrent un grand nombre de professeurs de neurologie et de psychiatrie, des philosophes et des psychologues aussi bien que les représentants des diverses religions.
Il était évident que le mouvement de l'ancien magnétisme animal, de l'hypnotisme et il ne faut pas l'oublier de la « Christian science » de Mrs Eddy avait gagné le grand public. C'est dans ces conditions quemes leçons sur la psychothérapie faites à Boston en 1904 et au Collège de France en 1907 essayaient d'apporter quelque contribution à un ensemble d'études intéressant.